il y a des idioties qu'on fait quand on est jeune. il a ces choses qu'on a envie d'essayer pour avoir l'air cool face aux autres. il y a cette envie de se faire remarquer, il y a cette persuasion que la vie sera plus belle et plus simple si on est considéré comme un membre de ce clan-là, qui ont tous les droits, qui ont leur territoire et leurs propres règles.
alors quand on veut en faire partie, alors quand on a une proposition, on ne la refuse pas, et ça peu importe le prix.
et le prix à payer est parfois tellement lourd.

c'était une vie menée par un seul et unique rêve : la musique. c'était une vie régie par un talent incontestable pour le piano. c'était une vie qui semblait toute tracée, qui semblait ne respendir que par la lueur des trophées de dizaines de concours remportés, qui semblait n'avoir pour prison que les murs sacrés des conservatoires. c'était une vie simple et tranquile réservée aux virtuoses.

seulement quand on est un artiste, mais que l'on est contraint par des moyens modérés de devoir fréquenter des écoles publiques, on est rapidement solitaire. on est rapidement détesté et méprisé de tous ; pour une raison étrange, d'ailleurs. alors quand on croule sous les insultes et sous les coups, on s'accroche à la seule porte de sortie possible.

alors quand on vous propose de rejoindre le clan de ceux qui ont la belle vie, on accepte. alors quand on doit passer une initiation, on accepte. alors quand on doit commettre une erreur, on accepte.

et quand on a pris cette subtence, quand on a subi le contre coup, quand on a une main presque paralysée par les effets secondaires, quand on ne peut plus toucher le piano, quand on voit ses rêves brisés par l'imbécilité de ses jeunes années ;

on a toute la vie pour le regretter.